Un numéro de la Revue Internationale de Philosophie sur les séries télévisées ? Est-ce bien sérieux ? Il y a encore une vingtaine d’années, cette éventualité aurait pu sembler bien improbable : l’objet relevait de la « culture populaire » et n’était à ce titre pas légitime. Certes, il peut arriver à Bergson de citer Labiche mais c’est pour exemplifier ses thèses sur le rire : on ne l’a jamais vu prendre au sérieux les feuilletons des journaux de son époque, encore moins en proposer une interprétation. Le cinéma a obtenu une reconnaissance tardive comme sujet de réflexion philosophique, sans doute par la constitution d’un corpus de « classiques », le travail d’une critique de cinéma aux ambitions théoriques marquées, et l’implication de philosophes reconnus dans le sujet (Gilles Deleuze), mais sans jamais qu’une œuvre cinématographique populaire soit prise au sérieux en tant que telle dans sa portée philosophique. Les séries télévisées, dont la réception est liée historiquement à l’univers domestique, souffrent d’une dévalorisation supplémentaire et sont régulièrement négligées y compris par la critique cinématographique.